Caracas, Festival mondial de la magie

mai 2002

Sommaire : Arrivée au Vénézuela  /  À l’affiche  /  Les villes  /  La sécurité  /  Rencontres  /  Rencontre avec le grand peintre Oswaldo Vigas

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Caracas 06.2002 théâtre Ateneo x2_modifié-1

de g. à dr.: Ernest, Louis, l’assistante de Yunke, la femme de Yunke, Yunke, Michelle – photo X

Arrivée au Vénézuela : De la Gold Coast australienne au Venezuela, avec seulement quelques jours à Paris entre les deux, c’est une sorte de grand écart : les deux tiers du tour de la planète, 14 heures de décalage horaire, d’un monde propre et ordonné, fort bien policé, éternel univers de vacances à « l’occidentale », nous voici transplantés dans un Venezuela agité de rumeurs et inquiet du lendemain, avec un président Chavez que les classes moyennes exècrent. Quelques semaines après le coup d’état manqué, les gens pensent peu à aller au spectacle ou à dépenser quoique ce soit en dehors de l’indispensable quotidien.

Et pourtant, Jorge Dikstin, notre producteur local et Gustavo Lorgia, directeur artistique Colombien assurent crânement la tournée du second Festival Mondial de Magie, contrairement à d’autres spectacles internationaux en tournée vénézuélienne. Bravo. Et merci à tous les spectateurs enthousiastes qui sont venus et qui ont permis à la tournée de se dérouler dans les meilleures conditions possibles. Ils ont eu d’autant plus raison de venir que le programme était de très bonne qualité et dans de beaux théâtres.

À l’affiche, en plus de Omar Pasha :

les Russes Netcheporenko avec leur original numéro du Grand Prix du Congrès Mondial magique de la F.I.S.M.1997,

Yunke dont on disait « le jeune Espagnol » et qui s’affirme maintenant avec son style personnel comme une valeur sûre de la jeune génération,

Gustavo Lorgia de Colombie, (directeur artistique de la tournée) avec une présentation hyper professionnelle de grandes illusions et de magie générale,

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Gustavo Lorgia dans l’avion entre Maracaibo et Caracas

L’Argentin Merpin, qui déchaîne les rires avec une énergie contagieuse tant par ses gags que par sa magie farfelue,

le Hongrois David avec ses belles et classiques manipulations, notamment avec des pipes, [occasion aussi de se souvenir du beau numéro de pipes de l’ami Michel Fontaine, dans les années 60 et 70],

remplacé après Caracas par Mirko jeune et fin magicien de Buenos-Aires au numéro très poétique,

enfin Sonny Fontana, « le régional de l’étape », illusionniste vénézuélien inventif qui présentait son théâtre d’ombres.

La tournée s’est déroulée dans le Nord-Est du pays, dans la capitale Caracas, à Maracay, Valencia, Maracaibo, Barquisimeto et Coro, dans de bons théâtres modernes ou anciens, comme à Valencia où le Théâtre Municipal, classé monument historique, date du XIXème siècle, typiquement “à l’italienne”, dans le style des théâtres européens des siècles passés. Voyez aussi Maracaïbo et Coro

Les villes sont sans plan d’urbanisme apparent, mélange de tours souvent construites sous la direction d’architectes très inventifs, mais aussi d’immeubles des dernières décades aussi gais que ceux des années 60/70 en Europe, ou de maisons individuelles ultra-protégées avec barreaux aux ouvertures et hauts murs d’enceinte. Aux périphéries, ce sont les « barrios », quartiers pauvres avec des maisons souvent inachevées, en briques brutes sans crépi, comparables aux favelas brésiliennes. Les centre-villes, qui étaient souvent les villes coloniales anciennes, sont parfois restaurés avec talent, mais sont trop souvent laissés à l’abandon, sinon à demi-détruits, avec d’innombrables boutiques bon marché et souvent vieillottes. Les centres commerciaux sont soit assez populaires, soit élégants et chers. Le très à la mode centre commercial « Sambil » déploie ses fastes en plein Caracas ; à l’extérieur, un écran géant offre jour et nuit ses publicités et présente en boucle le Festival Mondial de Magie avec de courts effets magiques de chaque artiste.

La sécurité est un thème quotidien, les mises en garde sont constantes et nous paraissent presque … surfaites. Il est pourtant prudent de ne pas se promener seul de nuit. A Valencia, où le théâtre est à moins de 10 minutes à pied de l’hôtel, nous sommes raccompagnés après le spectacle. A Maracaibo, si nous mangeons au restaurant la nuit, le taxi est commandé par téléphone (« un taxi de confiance », comme en Colombie) et un homme armé d’un énorme pistolet qu’il tient sur l’épaule, le doigt sur la détente, nous conduit à la voiture, referme la portière et surveille le départ.

Rencontres : Les Vénézuéliens sont gens sympathiques, pacifiques et facilement discoureurs. Le Président Chavez, « l’élu des pauvres », inquiète et crispe tous les autres citoyens qui sont alors intarissables contre le gouvernement. « Il va se passer quelque chose », « attention à ce qui va arriver au cours du prochain week-end », « il ne se passera pas un mois sans que … », « vous verrez quelque chose se passer avant la fin de l’année ». Pendant ce temps, le pays se paralyse, les affaires vont de plus en plus mal et on semble être dans un cercle vicieux. Alors que le Venezuela est un pays riche, 4ème producteur mondial de pétrole, avec d’immenses ressources naturelles et de grandes possibilités agricoles !

Les rencontres avec les magiciens vénézuéliens sont multiples et chaleureuses, rencontres privées ou soirées avec réceptions, remises de diplômes ou de souvenirs et cadeaux : le Cercle magique San Juan Bosco, l’AVAM (Association Vénézuélienne des Arts Magiques), Lisha, Mandrake, Metusan, le jeune Français Hyp Nauze, etc.

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remise de diplôme par le Président du Cercle Magique San Juan Bosco – photo X

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diplôme du Cercle magique San Juan Bosco

Rencontres aussi, très sympathiques et chaleureuses, avec l’Attachée Culturelle et le Conseiller à la Coopération et à l’Action Culturelle de l’Ambassade de France.

Oswaldo Vigas : Impossible de terminer sans évoquer une rencontre marquante pour nous : nous visitions avec un grand intérêt une exposition temporaire de peinture au Musée d’Art Contemporain de Caracas : « Ideografias de Paris, 1952/57 » du peintre vénézuélien Oswaldo Vigas.

Quelle n’est pas notre surprise, et notre plaisir, de rencontrer l’artiste lui-même au détour d’une des salles. C’était la première de plusieurs rencontres qui allaient se produire au fil des jours suivants, notamment au théâtre où nous travaillons, puis chez lui et dans son atelier.

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Avec Oswaldo Vigas chez lui – photo Mme Vigas 

Quels riches moments avec lui et son épouse Janine (de Montauban, avec l’accent !). Sans conteste, Oswaldo Vigas est un des grands peintres du XXème siècle, un maillon important de la peinture contemporaine. Il a rencontré ses pairs français et internationaux et travaillé dans le même esprit qu’eux. Mais son œuvre (peinture, mais aussi sculpture et céramique) est faite aussi des cultures, des mythes, des couleurs, des drames de son Amérique latine qu’il a préféré rejoindre après son expérience parisienne des années cinquante. Une découverte pour nous et une grande émotion que la rencontre de cet homme déjà âgé et à l’âme d’un jeune homme toujours en quête de nouvelles découvertes, toujours dispo pour de nouveaux combats artistiques ou (plus prosaïquement) …pour nous emmener, tard dans la soirée, chez le meilleur glacier de Caracas.

Oswaldo Vigas est décédé à Caracas le 22 avril 2014 à 87 ans.

Le Français Omar Pasha fait disparaître des objets, et même des personnes, sous le regard attentif du public stupéfait.

El Mundo, Caracas - 3 mai 2002