février 2005
“Follyrama”, spectacle de variétés au Casino du Liban
Beyrouth. Plus de 30 ans après notre séjour précédent, (avant Omar Pasha, avec nos précédents numéros de théâtre noir) nous revenons à Beyrouth. Depuis, il y a eu cette terrible guerre civile de 15 ans, avec tant de victimes et de destructions, et aussi, ensuite, les reconstructions dont celles du centre ville.
Nous sommes impatients de visiter la ville et une partie au moins du pays, de rencontrer des gens et de voir la vie actuelle.
Les premiers jours sont très occupés avec les répétitions et les premiers spectacles. Quelques jours après la Première, nous allons enfin, avec nos collègues, visiter la cité antique de Byblos. Pendant cette visite survient un évènement extraordinaire, en ce lundi 14 février 2005, à quelques kilomètres de nous. Lorsque survient un désastre quelque part dans le monde, les gens sont (plus ou moins) choqués. Lorsque vous êtes si près de l’attentat à la bombe contre l’ex-premier ministre libanais Rafiq Hariri, lorsque tant de personnes sont tuées, lorsque tant d’importantes destructions sont causées autour de l’énorme cratère, c’est une autre histoire. On se sent comme impliqué, l’émotion générale vous affecte.
Cependant, la direction du Casino décide de maintenir les représentations. Ce n’est qu’après une semaine que le public revient plus nombreux. Tous les jours se déroulent des marches de protestation. Pour notre sécurité, la Production interdit à tous les artistes de se rendre au centre ville.
Une semaine plus tard, enfin, on nous conduit tous en ville, tard dans la soirée. (Notre hôtel, ainsi que le Casino lui-même, est dans le nord de Beyrouth, dans un quartier chrétien.) Tout le monde est saisi par l’émotion à la vue du cratère provoqué par l’explosion, des importants dégâts alentour, des tombes sur la place toute proche. Même si tard, vers minuit, une foule recueillie stationne ou circule lentement.
Lorsque nous quittons finalement Beyrouth pour Paris, une très importante manifestation est attendue. Lorsque nous roulons en bus vers le sud pour l’aéroport, des soldats en armes sont partout en ville, des chars stationnent aux carrefours, leurs canons pointés à la hauteur de nos visages… Vues les circonstances, nous n’avons pas vu beaucoup de la ville ni du pays. Et nous n’avons pas eu de contacts avec d’autres communautés que les Chrétiens du nord de Beyrouth. Mais ce qui a été bien perceptible, c’est comment la vie d’un pays peut basculer en l’espace de quelques tragiques instants.